jeudi 28 mars 2024
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Les gilets jaunes au risque de l’histoire, par FREDERIC CEPEDE

Sylvain Boulouque, collaborateur régulier de nos publicationss, historien spécialiste des violences politiques, poursuit ses réflexions initiées dans l’entretien qu’il nous a accordé dans le dernier numéro de Recherche socialiste (86-87, juin 2019) sur le traitement médiatique du mouvement des gilets jaunes.(a/s de Sylvain Boulouque, Mensonges en gilet jaune. Quand les réseaux sociaux et les bobards d’État font l’histoire, Serge Safran éditeur, collection Boucan, 2019, 138p,14,90€)

article paru dans L’OURS 493, décembre 2019

Dans cet essai d’histoire immédiate qui paraît dans une nouvelle collection Boucan, il va bien plus loin dans son approche d’un mouvement inédit, convoquant tout un corpus d’études et d’articles parus dans la presse nationale et régionale, ou publiés en ligne. Avec son ton vif, ses formules qui font mouche, sa prose se lit agréablement. La première partie offre une chronologie commentée des « actes » et des acteurs du mouvement, de ses origines au 14 juillet 2019 (Acte 35). Pour lui, «les Gilets jaunes […] sont aussi des enfants de la macronie ».Il rappelle les revendications initiales (baisse des prix de l’essence…), les esquisses de programme (RIC…), les embryons d’organisation, les différents leaders. Surtout, il décrit avec précision, en s’appuyant sur sa propre observation des manifestations et sur les images qu’il était invité en « expert » à commenter sur les plateaux de télévision, les luttes d’influence sur le terrain entre les extrêmes droites, présentes dès le départ, et la gauche radicale, arrivée ensuite, pour canaliser à leur profit ce mouvement. « Dans la rue, les Antifa ont gagné la bataille par KO. Sur les réseaux sociaux, l’extrême droite a marqué son influence ». Mais, de Grenoble à Bordeaux, de la Bretagne aux Hauts-de-France, les acteurs ne sont pas les mêmes. Dans cette bataille, les partis traditionnels sont absents, dépassés. Face à la violence, sur-médiatisée par l’État, et à la répression brutale, dès le début 2019, le mouvement perd le large soutien de l’opinion. Sur la toile, les rumeurs prolifèrent.

Dans une deuxième partie, il interroge au regard de l’histoire la spécificité du mouvement des Gilets jaunes en répondant par la négative à une série de questions : ceci n’est pas « une jacquerie », « une révolte révolutionnaire », « une révolte sociale de la Belle époque », « un affrontement des années 1930 », « une manif de la guerre froide », « Mai 68 », « la Manif pour tous (mais un peu) », « un black bloc (mais un peu quand même) ». S’il reste encore beaucoup de questions en suspens sur ce mouvement et ceux qu’il draine, cet essai informé offre de stimulantes réflexions.

Frédéric Cépède

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