jeudi 25 avril 2024
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Millau, chaud devant ! par François Lavergne

Depuis 2015, une équipe d’amateurs d’histoire(s) de Millau et de ses environs s’attache à explorer à travers une revue annuelle les différents aspects de la vie et de l’histoire locale. Son nom, La main chaude, tout un symbole, renvoie au métier de la ganterie si important dans la région, à cette main métallique chauffante indispensable dans la dernière étape de la confection d’un gant. Qu’il s’agisse des activités agricoles et industrielles (notamment tout ce qui touche à la ganterie), des luttes sociales (grèves, manifestations…), des acteurs, des répercussions des événements nationaux ou internationaux sur l’histoire locale (les deux mondiales guerres, la guerre d’Espagne, la scission de Tours… ), les études proposées sont nourries d’une approche collective et « relèvent de la responsabilités de tous les membres de l’association ».

À propos de La Main chaude, association pour la promotion de l’histoire sociale millavoise, publication annuelle, 2022, n°8, 60 p, 8 €

Les deux premiers et copieux articles (un tiers de la revue) nourris d’archives de ce numéro 8 explorent sans œillères les heures sombres de la guerre : « Millau à l’heure de Vichy », et la reprise d’un article de l’historien Florent Le Bot consacré aux « Gantiers de Millau, de Grenoble et de Saint-Junien à l’heure des comptes » – signé celui-là – témoignent du respect de la revue pour la recherche historienne. Dans son éditorial, La Main chaude s’interroge à propos de son projet d’écrire une histoire de sa « contrée » : « Sommes-nous légitimes pour la raconter ? Nous le pensons : le recours à l’archive et au témoignage authentifié, les sources dévoilées, font que nos articles sont vérifiables et aujourd’hui approuvés par des historiens professionnels. On retrouve sur Internet des reprises de nos papiers : 1907, avec les cabanières de Roquefort, l’exode des enfants pendant la grève de 1911, la grande grève de 1935. Cette année, un passage du récit de “Guillaume Alméras, un Millavois soldat d’Empire”, a été lu sur France-Culture. »

Dans un format A4, sur papier glacé, sous une couverture en noir et rouge, la mise en page aérée et classique en deux colonnes vise avant tout la lisibilité. L’image de couverture – l’agrandissement d’une gravure représentant le révolte des Canuts à Lyon en 1831 – peut illustrer l’un des articles proposés sur « Mécanisation et bris de machines au début du XIXe siècle dans l’Hérault » (p. 29-37). La première manifestation de ce « luddisme » héraultais, étudié notamment à travers les rapports des préfets conservés dans les archives départementales, se produit à Clermont-L’Hérault en janvier 1818 avec une action de quelques ouvriers du textile qui tentent de rallier leurs camarades à leur mouvement : ils menacent les patrons de briser les machines s’ils ne donnent pas du travail aux 4 ou 500 des leurs restés sans emploi. En 1837, le chômage de masse dans les filatures provoquent des troubles du même ordre à Saint-Pons, Clermont et Ganges, et à Lodève en 1840 et à Bédarieux en 1844 ce sont des revendications salariales qui en sont à l’origine. Si les meneurs sont recherchés et condamnés, les autorités parfois conscientes des salaires dérisoires des ouvriers, recherchent la conciliation et la paix sociale en apportant des aides à travers des œuvres de bienfaisance. 

Du travail sérieux, donc, érudit et qui n’hésite pas à gratter dans les coins. Comme avec cette étude sur la colonie de redressement du Luc, à l’extrémité sud du plateau du Larzac, une structure privée réservée aux enfants « vagabonds », « délinquants », « malfaiteurs de l’avenir », qui fonctionna de 1854 jusqu’en 1929, accueillant en 1890 172 « colons » et encore de l’ordre de 80 dans ses dernières années. Un article accompagné de quelques échos des campagnes menées dans la presse contre ces bagnes, notamment dans la Feuille de Zo d’Axa.

Le lecteur découvre aussi des figures locales comme Victor le Gantier et ses “couillardises”, Eugène Viala, libertaire, poète, peintre et graveur, créateur de la revue éphémère (1908-1909) Le Cri de la terre, ou encore le Français Libre natif de Nant René Joseph Dardevet (1911-1982). Signalons que dans le numéro 7 (2021), ce sont les parcours des socialistes Maurice Paz et Magdeleine Paz qui étaient éclairés.

François Lavergne

Ont participé à ce numéro : Pierre Andrieu, Michel Artières, Michel Delmouly, Gilles Gesson, Florent Le Bot, MichelMArcillageonDidier Müller, Jacques Noyrigat, Jean-Louis Panné, Frédéric Sabatier, Patrick Taurines.

Association pour la promotion de l’histoire sociale millavoise, 48, Quai Sully Chaliès, 12100 Millau. contact : 05 65 60 78 01 / 06 03 79 13 76.

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