mardi 23 avril 2024
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Le poison de l’espionnage… par Sylvain Boulouque

Ces deux ouvrages, un roman et un témoignage, éclairent la nature du renseignement soviétique et post soviétique. À propos de Sergueï Lebedev, Le Débutant, Noir sur Blanc, 2022, 220 p, 20,50 € et Serguei Jirnov, L’éclaireur, Nimrord 2022 528 p. 23 €

L’ouvrage de Sergueï Lebedev, un familier du roman historique, suggère une enquête sur la fabrication des poisons, dont l’usage est un classique de l’histoire russe depuis Pierre Le Grand poursuivi par Lénine et Staline. Le héros est chargé de fabriquer une nouvelle mouture du produit assassin. L’auteur se livre alors à une longue mais passionnante dégression sur l’enfance d’un futur jeune chimiste soviétique et le monde du secret qui entoure les services de renseignement. Jusqu’au jour où, à la faveur de la fin de l’URSS, il passe à l’Ouest et livre les secrets aux ennemis jurés occidentaux. Mais le KGB devenu FSB a la mémoire longue et lance un agent à sa poursuite. Le combat s’avère inégal… Magnifique plongée dans ces arcanes troubles… qu’illustre en partie l’ouvrage de Serge Jirnov.
Les mémoires d’anciens agents du KGB ayant rompu avec leur appareil sont rares… et se font de plus en rares. Dans ce livre d’entretiens avec Jean-Luc Riva, un ancien militaire spécialisé dans le Renseignement, Jirnov a choisi de raconter son passé au grand jour pour éviter de s’attirer les foudres de son ancien camarade de promotion Vladimir Poutine, qu’il a croisé avant même d’être agent.


Jirnov est un brillant élève, communiste dans l’âme. Chef komsomol, il intègre l’institut des relations internationales. Dès cette date, il travaille pour les services, chargé de livrer des informations de service de glaive et de bouclier pour le Parti État soviétique et jurant de ne jamais abandonner leurs idéaux. Il est recruté en 1984 comme agent du KGB chargé d’infiltrer des organismes à l’étranger dans le département S. : entraînement militaire avec les commandos parachutiste, cours intensif de langue, techniques de clandestinité diverses et variées dont la majeure partie a été consignée sur papier par les agents et apprentissage de la création de dossiers, les kompromat. Jirnov ne fait pas qu’évoquer sa formation, il rend compte de la vie des citoyens soviétiques qui, à son image, vivent à 5 dans une pièce de 16 m2 dans un appartement communautaire. Il évoque les classiques qui fondent la culture des Soviétiques, comme le roman devenu série télévisée, 17 moments du printemps, véritable apologie des services de renseignements soviétiques. Enfin, il est lancé dans le grand bain des agents à l’étranger intègre l’ENA pour nouer des contacts et exercer quelques influences.

Comme souvent avec ce type de témoignage, le lecteur est obligé de le croire sur parole, mais, en tout cas, il retrace une atmosphère et un mode de fonctionnement qui donne à comprendre le présent russe.

Sylvain Boulouque

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