samedi 27 avril 2024
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« Les gauches divisées, 100 ans après le congrès de Tours »

Compte rendu de l’Atelier 3 de l’OURS au Rendez-vous de la gauche d’après, samedi 29 août, 14 h -16 h. Débat animé par Frédéric Cépède, avec la participation de Marion Fontaine, historienne, et de Gilles Candar, président de la société d’études jaurésiennes.

En introduction, Frédéric Cépède est revenu sur la mémoire de ce congrès chez les socialistes, une défaite difficile à commémorer pour eux : le discours de Blum n’est ainsi édité qu’en 1934. Alors que la SFIO se différenciera du PCF en diffusant les 21 conditions et leur conception d’un parti d’un type nouveau, avec le PS des années 1970 le discours « prophétique » de Blum revendiqué par Mitterrand donne raison aux socialistes de leur choix de Tours, confirmé par la chute du mur de Berlin et l’effondrement de l’URSS.

Divisions entre frères ennemis
Dans son exposé introductif Gilles Candar, historien, président de la Société d’études jaurésiennes, a exposé les enjeux, les débats du congrès et de la scission. Il a insisté sur le fait que Tours ne départage pas adversaires et partisans de la révolution russe, ni révolutionnaires et réformistes : les courants du parti sont tous divisés et l’on voit l’ex-minoritaire Longuet être exclu par Moscou du nouveau parti, et l’ex-majoritaire Cachin accueilli à bras ouvert. Le contenu des 21 conditions, central pour Blum et les siens, largement débattu, importe moins pour beaucoup de délégué.e.s que la volonté de marquer la rupture avec ceux qui ont conduit le parti durant la guerre. S’exprime aussi l’idée que les communistes français pourront continuer à fonctionner comme avant, débarassés des plus tièdes. Mais ce n’est que dans les années suivantes que la SFIC s’adapte au modèle bolchevique, après une série d’exclusions ou de démissions. 

Marion Fontaine, historienne, maîtresse de conférences à l’Université d’Avignon, a analysé les relations entre les « frères ennemis » depuis le congrès de Tours. Le moment « mythique » reste le Front populaire, dont il ne faut pas oublier qu’il s’agit d’une alliance défensive (contre le fascisme) et fondé sur un programme minimum, plus proche de celui du Parti radical, les congés payés n’y figurant pas. Dans le contexte de la Libération, le PC auréolé de son rôle dans la Résistance face à des socialistes qui peinent à faire reconnaître leur part, participe dans le cadre du tripartisme avec le MRP, parti centriste, alors que les radicaux sont marginalisés. L’entrée dans la guerre froide, qui réactive les relations violentes entre socialistes et communistes d’après Tours, convainc la SFIO que le PC n’a pas changé. Face à la Ve République, dans les années 60, SFIO et PCF recherchent un rapprochement « doctrinal », certains évoquant l’idée « d’effacer 1920 ». Après 1971 néanmoins, l’union de la gauche – où il s’agit pour F. Mitterrand de ramener vers le PS les électeurs de gauche qui votent communiste – , puis la gauche plurielle sont des accords programmatiques en vue d’exercer le pouvoir. Ce qui n’empêche pas, au plan local, que des rapprochement et des « unions » se concrétisent au-delà des états-majors. 

État de la gauche
L’atelier a réuni une cinquantaine de participants. Les questions et interventions ont concerné le présent, loin d’une explication de texte des 21 conditions ou des questions posées à Tours. La gauche de 2020 n’a plus grand-chose à voir avec celle de 1920, avec des acteurs nouveaux et son regard contrasté sur son exercice du pouvoir. Sur les perspectives de rapprochement, le récit d’expériences à Montpellier, Marseille, Rezé à l’occasion des dernières municipales peut laisser apparaître que les électeurs de gauche y sont sensibles. 

Mais, comme le rappellent G. Candar et M. Fontaine, les militants socialistes, communistes, écologistes, insoumis portent des cultures différentes, qu’il ne faut pas négliger. La perspective d’exercer le pouvoir ne les sépare plus. Les alliances locales peuvent apporter des points d’appui, mais logique institutionnelles oblige, le choix d’un « candidat » pour incarner la gauche et ses familles semble encore plus problématique que de s’accorder sur un projet et un programme. F. C.

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