ACTUALITE
L'OURS
PUBLICATIONS
DEBATS DE L'OURS
LIVRES DIFFUSÉS
SEMINAIRE OURS
ARCHIVES BIBLIOTHEQUE
TEXTES, IMAGES, DOCUMENTS
L'OURS Signale (colloque,
LIENS UTILES
NOUS ECRIRE
 
Nous joindre
L'OURS 12 Cité Malesherbes 75009 Paris
Tél. 01 45 55 08 60
Pour être informé de nos activités (réunions, parutions, séminaires…), laissez nous un message électronique :
e-mail : info@lours.org
 
L'OFFICE UNIVERSITAIRE DE RECHERCHE SOCIALISTE
 
Ducoulombier exposé Séminaire 2003
Régénération révolutionnaire et homme nouveau prolétarien
dans le premier communisme français (1917-1924)



L’historiographie française du communisme, malgré des travaux fondateurs qui y furent consacrés, en particulier la thèse d’Annie Kriegel, semble depuis maintenant quelques années négliger assez largement la période fondatrice dans l’histoire du Parti communiste français que furent les années 1917-1924.

L’histoire du communisme semble désormais considérer que le communisme véritable ne commence plus qu’avec la bolchevisation, rejetant le communisme français des origines dans une sorte d’obscurité confuse, marquée du sceau de l’échec révolutionnaire (en quelque sorte le syndrome de l’occasion manquée), dominée par des amateurs révolutionnaires, qui ne furent pas authentiquement communistes du fait qu’ils n’étaient prétendument pas ouvriers, sous le prétexte sans doute qu’ils n’avaient pas été sélectionnés par les instances et selon les critères du parti communiste stalinien qu’est devenu progressivement le PCF à partir de 1925.

Au fil de notre travail, cette négligence nous a semblé contredire un constat de bon sens, à savoir que l’étude des origines d’un mouvement politique ou social engage toujours les formes de son avenir. C’est par conséquent l’expression de « premier communisme français » qui nous est apparue la plus claire pour restituer à ces années fondatrices leur unité, au-delà de l’apparente confusion et des luttes politiques de tendances âpres qui la caractérisent. Qui dit premier communisme français, dit certes second communisme français, dont l’histoire s’ouvre en effet par la bolchevisation du parti à partir du Congrès de Clichy en janvier 1925. Et c’est bien à Clichy que le premier communisme français trouve son terme, puisqu’on y voit les derniers souvariniens (Amédée Dunois est contraint de sortir de la salle du congrès sous les huées des militants) et les grands « premiers communistes », comme Charles Rappoport, se voir infliger une humiliation publique dont ils ont tous conservé une grande amertume. Clichy, sous la direction de Treint et de Girault, achève en effet le processus d’épuration de la gauche du parti entamé par l’exclusion de Boris Souvarine, et clôt en quelque sorte un cycle pour en ouvrir un autre. Le parti que ces hommes ont bâti n’est pas cependant détruit ; il leur survit, comme un héritage, ce que dans leurs premières années d’exil hors du communisme ils n’ont cessé d’affirmer, croyant à tort qu’ils l’avaient emporté avec eux. Les pratiques que ces militants ont contribué à installer dans le Parti, les institutions qui ont jeté les bases de la contre-société communiste en devenir, les mécanismes partisans de sélection et d’exclusion des militants qu’ils ont imposés, ont survécu à leur exclusion, et ont été prolongés, et non bouleversés, par la bolchevisation des structures du parti et la mise en place de cellules d’entreprises. Le fait que le groupe des treintistes soit désigné pour procéder à cette liquidation symbolique du premier communisme français n’est pas un hasard ; il incarne, sur la gauche du parti, une tendance, étroitement militariste, et très anti-souvarinienne, capable de procéder à cette liquidation du fait de son manque d’attachement, en profondeur, aux héritages militants du socialisme français, dont le premier communisme français se prétendait un prolongement, un dépassement vertueux – ce manque d’attachement, les parcours de Treint, broyé par la guerre de 1914 (il hésita longtemps entre carrière militaire et carrière militante) et Girault (française déracinée, russe d’adoption, prise en mains par les bolcheviks dans les pires années de la guerre civile dont elle eut personnellement à souffrir, et animée d’une détestation secrète des premiers communistes français, qu’elle jugeait « bourgeois » au contraste de l’ascétisme des bolcheviks) le montrent bien. La valeur de rupture de la bolchevisation du parti fut par conséquent mal appréciée, avant d’être répétée sans nouvel inventaire ; le premier communisme français, à cette aune, a perdu son importance initiatique et fondatrice dans la mise en place des pratiques et des institutions propres au communisme français.

Ce travail de DEA, et la thèse, entamée cette année, qui doit encore en sortir, reposent sur l’idée que c’est la guerre qui a fait naître, au sein du mouvement minoritaire socialiste, un projet de régénération révolutionnaire du socialisme dont l’achèvement précéderait, en France, l’éclatement d’une révolution sociale immense et violente, bientôt calquée sur le modèle bolchevique. Cet idéal de régénération révolutionnaire repose à l’origine même d’un processus de nature totalitaire, qui aboutit à la mise en place, en 1920, d’un parti de type nouveau, inspiré par le précédent bolchevique. Ce travail vise donc pour l’essentiel à tenter de restituer un processus : à rendre à ce processus révolu de totalitarisation de la société française par sa gauche sa matérialité effective, par conséquent à entamer un travail d’enquête érudite dans des directions à la fois politiques et partisanes, organisationnelles et sociétales, intellectuelles et représentationnelles, afin d’apporter à ce que la prudence réclame encore d’appeler une hypothèse un début de confirmation théorique, mais plus encore de démonstration factuelle par le retour à l’archive. Cette hypothèse impliquait en contrepoint d’étudier les mécanismes et les tensions qui, chez les communistes de la première heure qui abandonnèrent la nouvelle maison, ont accompagné la dissipation, plus ou moins rapide et douloureuse, de cet espoir de régénération miraculeuse du socialisme par le communisme qui ne s’est pas réalisé, du fait en particulier de l’intransigeance brutale de l’ascétisme inquisiteur que prônait la gauche du parti et dont ils furent les victimes. L’histoire de cette dissipation, dont le moment fort est le départ des frossardiens en 1922, mais qui s’achève en 1924, est un des acquis de cette recherche. En voici les principes et les étapes.
1- Régénération et totalitarisme
2 - L'histoire du premier communisme français
3 - Pistes de recherche
 

 
© L'OURS - 12 cité Malesherbes 75009 Paris