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L'OFFICE UNIVERSITAIRE DE RECHERCHE SOCIALISTE
 
Braud/Europe Intro
L’Europe, du politique au social
Dossier introduit par MAURICE BRAUD

L’année 2004 est plus que jamais, une année cruciale pour l’Union européenne à tout le moins à trois titres.
- Avec l’entrée dans l’UE le 1er mai 2004 de dix nouveaux États, le processus continu d’unification économique et politique du continent européen depuis cinquante ans se poursuit mais s’accélère considérablement. C’est là un mouvement historique dont rêvaient sans trop y croire ceux qui nous ont précédés dans le combat européen et qui se réalise enfin sous nos yeux. Indiscutablement, ce dernier élargissement pose des difficultés pratiques, mais sur le moyen et le long termes il est un gage de sécurité et de prospérité pour tous.
- Le renouvellement quinquennal du Parlement européen, l’assemblée démocratiquement élu par les citoyens de l’ensemble de l’Union européenne. Au cours des dernières révisions des traités européens (en particulier Maastricht 1992, Luxembourg 1997 et Nice 2000), les compétences proprement législatives du Parlement européen se sont élargies et tendent à en faire un véritable co-législateur, avec le Conseil de l’UE. Cette évolution, souhaitable, doit être confirmée par la révision des traités en cours.
- L’établissement et l’adoption d’une constitution européenne. La révision en cours des traités européens a pris la forme, via le travail important réalisé par la convention européenne, d’un texte constitutionnel de l’Union européenne. Ce premier texte est certes critiqué, il sera sans doute (nous l’espérons) amendé et amélioré. Il n’en demeure pas moins que, sans bruit et loin des caméras et de l’attention des citoyens comme des médias, la convention a permis à l’UE de franchir une étape importante : dépasser le statut d’une organisation politique internationale régie par des traités internationaux pour devenir une entité politique véritable, fondée par une constitution démocratiquement validée par ses citoyens ou leurs représentants.
Si ces trois événements sont essentiels pour le développement de l’UE, il nous a semblé cependant que notre identité socialiste revendiquée nous imposait de revenir à l’intersection du projet socialiste et du projet européiste : la « question sociale européenne ».

L’Europe sociale : acquis et limites
La fonction de l’OURS n’est pas d’établir des programmes, mais d’inciter à la réflexion et au débat. Aussi, les approches que nous vous proposons de cette difficile et problématique question sociale européenne sont fortement différenciées, voire partiellement divergentes, mais elles s’articulent les unes et les autres logiquement.
Première temps de ce dossier, il fallait baliser le terrain de ce qui existe déjà dans le domaine social au niveau européen. Contrairement à une idée largement répandue, dans les rangs socialistes comme ailleurs, mais objectivement fausse, les actuels traités européens comportent des dispositions sociales non négligeables, et les institutions européennes ont développé depuis l’origine (dès la première Communauté européenne, celle du charbon et de l’acier) des programmes en ce domaine. Simon Lory fait le point sur ce sujet.
Depuis 1997, avec le traité d’Amsterdam (juin 1997) et le Conseil européen extraordinaire sur l’emploi de Luxembourg (novembre 1997), l’Union européenne développe dans certains domaines, en particulier pour l’emploi, non pas des politiques communes au sens strict, mais des coordinations européennes de politiques nationales qui tendent à impliquer fortement les différents acteurs concernés, au-delà des seuls pouvoirs publics. La stratégie européenne pour l’emploi (SEE) est le prototype de ce nouveau mode d’intervention, désormais appelé méthode ouverte de coordination (MOC) depuis le Conseil européen de Lisbonne (mars 2000), avec pour objectif de faire de l’UE l’économie de la connaissance la plus dynamique du monde à l’horizon 2010. Le Conseil économique et social français (CES) et sa délégation pour l’Union européenne sont fortement attachés à la réussite des objectifs et de la méthode retenue. Le bureau du CES a adopté en novembre 2003 une communication importante en ce domaine qu’Évelyne Pichenot, présidente de la délégation du CES pour l’Union européenne, a accepté de nous présenter.
Toutefois, et en dépit des avancées, force est de reconnaître que beaucoup reste à faire dans le domaine social européen. Encore faut-il définir comment, avec qui et à quelle(s) fin(s). C’est ce débat qu’esquisse pour nous Philippe Pochet. Directeur de l’Observatoire social européen, il suit l’actualité européenne depuis de nombreuses années, et a étudié à travers de multiples articles et ouvrages l’action communautaire, ses modalités et ses moyens, dans le domaine économique et social aux diverses époques. Il incite à travers l’interrogation qui est la sienne sur les positions traditionnellement défendues par son pays, la Belgique, à discuter sans œillères les différentes positions défendues par chacun, citoyens comme gouvernements. Il interroge justement sur la faiblesse structurelle des acteurs sociaux au niveau européen, sur l’ambiguïté de la stratégie européenne pour l’emploi, et surtout sur l’incapacité des mouvements politiques et acteurs sociaux de gauche en Europe, qu’ils s’affirment réformistes ou révolutionnaires, à saisir l’opportunité de la révision régulière des traités européens pour organiser des mobilisations dignes de ce nom susceptibles de modifier en profondeur les attributions et les moyens des institutions européennes.
L’article suivant s’attache plus précisément à rendre compte des changements internes à la Confédération européenne des syndicats (CES/ETUC) depuis au moins un an. Il revient sur le cycle politique incarné par le tandem Gabaglio/Lapeyre à la tête de la CES et le changement de donne politique qui, au-delà des personnes, contraint le mouvement syndical européen à jeter les bases d’une nouvelle stratégie politique. Reste ouverte la question de savoir si le mouvement socialiste et social-démocrate européen souhaite et est en mesure de demeurer l’interlocuteur politique privilégié du mouvement syndical européen, et pour quel projet.
Enfin, Jacques Defay – relisant l’ensemble de la période qui nous sépare de la Seconde Guerre mondiale - nous propose une perspective stimulante, conditionnée cependant par la majorité politique à venir des élections de juin prochain. Reprenant les grandes lignes de son ouvrage Par-dessus le marché, Jacques Defay propose une voie résolument fédéraliste et socialiste où l’UE se donnerait les moyens de rompre avec la pensée unique et son corollaire, la croissance lente, pour renouer avec les objectifs des premières communautés d’égalisation dans le progrès, par une politique économique européenne coordonnée de relance de la croissance par la demande. Une majorité politique de progrès est nécessaire au Parlement européen pour y parvenir.
L’article de Pier Virgilio Dastoli clôt ce dossier par une analyse plus politique. L’auteur, observateur attentif de la vie politique italienne et rompu aux arcanes communautaires, étudie le rôle de l’Italie dans la construction communautaire, hier à la pointe du mouvement oeuvrant à une véritable intégration politique européenne, aujourd’hui avec Berlusconi travaillant à une UE a minima, vaste zone de libre-échange économique sans colonne vertébrale.
Les notations de Dastoli sur le déroulement et le travail de la convention européenne sont précieuses. Elles indiquent en creux l’incapacité des seuls gouvernements à progresser dans l’approfondissement de l’Union par la méthode des conférences intergouvernementales (CIG), mais aussi l’intérêt et les limites de l’expérience de la convention comme lieu du jeu de forces (gouvernements nationaux, parlements nationaux, Parlement européen, Commission européenne) parfois convergentes parfois antagoniques, tantôt se complétant et s’enrichissant, tantôt se paralysant. Les quelques remarques concernant l’ouverture à la société civile ne manquent pas non plus d’intérêt.
Fort de son expérience européenne, en particulier auprès d’Altiero Spinelli1, Dastoli appelle à une nouvelle alliance entre l’expression des peuples et des citoyens européens, le Parlement européen, et l’éxécutif virtuel de l’Union européenne qu’est la Commission européenne.
A travers ce « dossier européen » et les éclairages qu’il propose, notre contribution au débat qui s’ouvre maintenant entre socialistes et hommes et femmes de progrès, militants politiques mais aussi syndicalistes, responsables associatifs ou simples citoyens actifs entend amorcer un travail qui ira au-delà des prochaines élections au Parlement européen. Dans les temps à venir, et précisément sur les enjeux européens, nous poursuivrons et élargirons cette discussion amorcée avec nos amis italiens et belges avec des camarades et collègues d’autres pays. L’Europe se construit aussi à travers la mise en place progressive d’une agora européenne, d’un espace public de discussion et de débat dans lequel l’OURS et les centres et organismes qui lui sont proches doivent prendre chacun leur place.
Maurice Braud

(1) Cf. Cahier et Revue de l’OURS, n°3/4, 1994
 

 
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