ACTUALITE
L'OURS
PUBLICATIONS
DEBATS DE L'OURS
LIVRES DIFFUSÉS
SEMINAIRE OURS
ARCHIVES BIBLIOTHEQUE
TEXTES, IMAGES, DOCUMENTS
L'OURS Signale (colloque,
LIENS UTILES
NOUS ECRIRE
 
Nous joindre
L'OURS 12 Cité Malesherbes 75009 Paris
Tél. 01 45 55 08 60
Pour être informé de nos activités (réunions, parutions, séminaires…), laissez nous un message électronique :
e-mail : info@lours.org
 
L'OFFICE UNIVERSITAIRE DE RECHERCHE SOCIALISTE
 
Bergounioux, Editorial RS 20
Editorial
Ce numéro de Recherche socialiste s’engage au cœur du débat que doivent avoir les socialistes. Quoi de plus central, en effet, que le travail dans la pensée socialiste ? Le socialisme est né d’une critique des injustices et de l’irrationalité du capitalisme. Il voulait (et veut) émanciper le travail de ses aliénations provoquées par l’exploitation. Il y a certes tout un courant qui a cherché et cherche à « dépasser » le travail. On se souvient du Droit à la paresse de Paul Lafargue et des accents de Marx sur ce que pourrait être la journée de l’homme dans la société communiste réalisée, tout ensemble, lecteur, artisan, chasseur, artiste… Mais, historiquement, c’est bien autour de l’idée que le travail débarrassé de l’aliénation capitaliste révélerait « l’homme à son humanité » que s’est fondée l’anthropologie socialiste. Et, pratiquement, les mouvements socialistes ont lutté et œuvré pour la dignité du travail et des travailleurs. Ils ont pour cela toujours défendu le plein emploi. Ils ont largement contribué à construire une condition salariale reposant sur des droits reconnus et des institutions sociales.

C’est justement ce qui est en cause aujourd’hui. Le chômage élevé, la précarité de l’emploi, la dérégulation sociale sont autant de défis radicaux. Les causes sont connues. La mondialisation libérale, qui met en compétition tous les systèmes économiques et sociaux, appuyée et amplifiée par la révolution technologique informationnelle, amène irrévocablement une restructuration en profondeur de nos appareils productifs. Dans nos pays développés, nous allons vers une économie principalement de services avec quelques branches industrielles à haute valeur ajoutée. Des changements profonds ne peuvent qu’en résulter pour l’emploi.

Le débat politique a donc rebondi. Et, étonnamment, nous retrouvons souvent les termes du débat du XIXe siècle que Karl Polanyi a si bien décrit dans La Grande Transformation… « Libéraux », « utopistes », « travaillistes » pour reprendre les notions de Richard Sobel dans ce numéro, s’affrontent à nouveau. L’issue de ces confrontations est incertaine. Vraisemblablement, elle dépendra de la capacité que les socialistes auront ou non de proposer et d’imposer des règles à la mondialisation libérale. Tâche impossible ? Non, pas plus que ne l’a été la construction d’une condition salariale dans le « capitalisme sauvage » du XIXe siècle.

Pour bien comprendre le sens de ce combat, l’OURS a voulu dans cette livraison de sa revue partir des problèmes fondamentaux. L’article de Jean-Pierre Yonnet, qui a coordonné ce numéro, revient sur les définitions du salaire pour montrer qu’il participe étroitement à la réalité de la solidarité nationale. Le salaire tout autant qu’une réalité économique est un enjeu politique. Richard Sobel chasse les confusions qui s’établissent trop souvent entre les notions de travail, d’activité et d’emploi. Il défend de manière convaincante la thèse que « c’est dans l’emploi que se dépassera à moyen terme la crise actuelle de l’emploi ». Jacques Freyssinet, directeur de l’IRES (Institut de recherches économiques et sociales) de, dresse un portrait de la société salariale aujourd’hui et de ses évolutions. Il dessine ce que doivent être les moyens d’une « restabilisation » de la condition salariale – appuyant ainsi les conclusions de la contribution de Richard Sobel. Florence Lefresne, chercheuse à l’IRES, qui pointe ici la différenciation accélérée des statuts salariaux, relève qu’un des risques de la situation actuelle est « celui de l’accentuation du fractionnement des statuts et le renforcement des inégalités avec la montée du chômage ». L’article de Maurice Braud fait un point fort utile sur la manière dont les socialistes depuis Épinay ont compris et traité la question salariale.

Nous avons également demandé aux grandes confédérations syndicales de nous donner leurs analyses sur les manières dont elles pensent le salariat actuellement et sur leurs définitions de ce que doit être la « démocratie sociale » demain, en France et dans l’Union européenne, tant les deux réalités sont liées aujourd’hui.

Ces articles constituent un fondement solide pour une réflexion socialiste d’avenir. L’OURS entend bien poursuivre le débat. Nos lecteurs peuvent apporter leurs contributions dans notre Tribune. Il serait tout à fait intéressant de voir comment pourrait se construire une « sécurité d’emploi » pour les travailleurs. On voit bien qu’il est nécessaire maintenant de faire converger tout un ensemble de chantiers déjà ouverts, mais inaboutis, au premier rang desquels « la formation tout au long de la vie », pour construire un nouveau droit pour tous, réconciliant le travail, l’emploi et l’épanouissement personnel. Qui a dit qu’il n’y avait plus d’utopies !
Alain Bergounioux
 

 
© L'OURS - 12 cité Malesherbes 75009 Paris