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L'OFFICE UNIVERSITAIRE DE RECHERCHE SOCIALISTE
 
1940-1944 Les socialistes à Londres et en Amérique
IV - LES SOCIALISTES A LONDRES

A – Le Groupe Jean-Jaurès

Dès juillet-août 1940, un certain nombre de socialistes peuvent partir en Angleterre où ils prennent contact avec le Parti travailliste (Labour Party) et la Société Fabienne.
C’est au siège de la Société Fabienne (Dartmouth Street) que se tient la réunion où est décidée la fondation d’un « Comité » des socialistes français (août 1940). A cette réunion tenue à l’initiative de Henry Hauck et de Louis et Marthe Lévy assistent : Mabel Haucq, Charles et Georges Gombault, Gustave Moutet (fils de l’ancien ministre), Chaput, Akoun. Ce « comité » prendra bientôt le nom de Groupe Jean Jaurès, Comité de liaison des socialistes français en Grande-Bretagne (24 août 1940). Il est ouvert à tous les socialistes. Chacun paie une cotisation. Le Comité agit en relation étroite avec le Labour Party et avec l’Internationale socialiste. Il déclare mener la lutte pour la libération de la France et la restauration de la démocratie. Il reste en relation avec les socialistes restés en France.
Adhérent à ce comité, au fur et à mesure des arrivées à Londres : Fabre, Bignafet, Georges Boris (dès le début), puis André Philip, Pierre Brossolette, Félix Gouin, Jules Moch, Raymond Hass-Picard, etc.
Les socialistes qui peuvent aller à Londres comme André Philip (qui y reste) ou Daniel Mayer (qui revient en France) prennent contact avec « le Groupe Jean Jaurès », dont la secrétaire est Marthe Louis-Levy.
Leurs relations avec la « France Libre »du Général de Gaulle sont assez délicates.
Les uns – comme Georges Boris, Henry Hauck (1), André Philip, Pierre Brossolette font entière confiance au Général de Gaulle – qui, à leurs yeux, incarne la Résistance.
Les autres (comme Louis et Marthe Lévy, Georges Gombault) font toutes réserves sur le caractère politique de la « France Libre ». Ils jugent le Général – et son entourage – très conservateurs et le Général très ambitieux, menant une politique personnelle à tendance dictatoriale.
Leurs opinions sont exprimées dans leur journal France qui paraît à Londres.
Ils ont parfois des difficultés à comprendre les transformations qui se font en France occupée, à la suite de l’occupation nazie : des gens de droite (comme Charles Vallin, ancien PSF, qui est anti-pétainiste, est devenu gaulliste et résistant, et s’est donc rapproché de la gauche). Or, quand Vallin arrive à Londres, patronné par Brossolette, cette arrivée provoque de violentes discussions au sein du Groupe Jean Jaurès (octobre 1942).

Les socialistes restés en France qui font confiance à de Gaulle (en particulier grâce à Blum qui écrit une lettre célèbre au Général) désirent aller à Londres pour comprendre la position du Comité Jean Jaurès et aussi pour voir de Gaulle et rapporter leur opinion personnelle. Les lettres de Gouin à Blum sont plus réticentes, vis-à-vis du Général que celles d’André Philip.
Dès le début de 1942, Christian Pineau avait réussi à aller à Londres où il avait vu le Général et, après de nombreuses et difficiles conversations, avait obtenu de lui un « Manifeste » qui fut publié dans le journal Libération-Nord et dans d’autres journaux de Résistance.
A son tour sur les conseils de Léon Blum, Daniel Mayer (nous l’avons dit) partit pour Londres en avril 1943. Entre autres choses, sa mission avait pour but de discuter avec ses amis du Groupe Jean Jaurès et d’essayer d’arriver à un accord entre tous les socialistes. Ce ne fut pas une tâche facile. Daniel Mayer vit souvent les uns et les autres mais il eut de la peine à obtenir un accord complet entre eux et entre eux et les socialistes de France, ralliés au Général. Cet accord, il ne l’obtint qu’à demi. En voici le texte ;
« La majorité des camarades du « Groupe Jean Jaurès » ont pris connaissance de la déclaration des Socialistes en France.
« Ils constatent avec joie que, sur les principes essentiels du socialisme, de la démocratie et de l’internationalisme, ils se trouvent en complet accord.
« Ils sont heureux, en particulier, de constater que sur l’existence nécessaire des partis et le fonctionnement de la démocratie politique, leurs vues concordent absolument.
« Ils prennent acte de la position des camarades de France au sujet d’un gouvernement présidé par de Gaulle. Ils pensent que les événements se chargeront d’aplanir, sur ce point, la divergence de tactique qui les sépare. Ils feront tout pour garder des contacts avec eux et les informer régulièrement. Ils continueront d’aider de leur mieux les camarades adhérant au mouvement de Gaulle à exiger les garanties réclamées par la déclaration.
« Aussi bien, ils sont unanimes à reconnaître que leurs camarades de France, engagés dans une bataille extrêmement dangereuse, sont plus aptes à juger les nécessités quotidiennes de l’action et de l’évolution populaire.
« Ils comptent sur eux, qui connaissent leur attachement au Parti, pour comprendre que, mieux placés qu’eux pour pouvoir se rendre compte exactement de ce qui se passe à Londres, et de façon générale, dans le domaine international, ils sont libres d’exercer leur droit de critique en socialistes soucieux uniquement des intérêts du pays, de la démocratie, du prolétariat international, et de la Révolution
» (2).

(1) Boris et Hauck collaborèrent avec le Général, ainsi que Brossolette qui est très gaulliste, bien qu’il connaisse les défauts de De Gaulle. Voir, plus loin, sa lettre au Général ; cf aussi le témoignage donné par Georges Boris à Marie Granet (Archives Nationales)
(2) Pour tout ce chapitre, voir Daniel Mayer, Les Socialistes dans la Résistance.

B – Les socialistes auprès du général de Gaulle
Pierre Brossolette
Il ne fut pas le premier à rejoindre à Londres le général de Gaulle, mais il fut le plus célèbre, tant à cause de son influence que de sa fin tragique. Fils d’un inspecteur primaire, normalien, professeur, il abandonna rapidement (‘enseignement pour la politique, il écrivit dans Le Populaire et fut même candidat – malheureux – à la députation dans l’Aube où, durant sa campagne électorale, il fut aidé par son ami Rincent (qui fut aussi un résistant courageux, membre de Libération-Nord). Pendant la guerre de 1939-40, il fit à la radio française des émissions remarquables par leur fermeté et leur intelligence. La défaite venue, il demande un poste dans l’Université. Vichy le lui refuse ! Il ouvre alors une librairie rue de la Pompe. Il a bientôt des contacts avec Rémy, chef d’un réseau de renseignements qui devait devenir célèbre, le réseau CND (Confrérie Notre-Dame), ce qui est son entrée dans la Résistance. Puis, en août 1942, un jour, par hasard, un de ses camarades de l’Ecole Normale, Berthelot, entre dans la librairie, reconnaît Brossolette, et lui offre d’entrer dans un Mouvement important dont il fait partie : l’OCM. Brossolette accepte et est présenté au Colonel Touny, chef de l’organisation militaire du Mouvement. Brossolette, à son tour, lui présente Rémy ; il s’ensuivra une utile collaboration entre le réseau de renseignements de l’OCM, Centurie et la CND. Et c’est grâce à Rémy que Brossolette pourra partir à Londres, sous le pseudonyme de Pedro, en mai 1942. Il revient en France en juin, puis retourne à Londres, où il inspire confiance à de Gaulle pour qui il a une vive admiration, tandis que le Général apprécie l’intelligence et le courage de ce socialiste qui ne cache pas ses opinions et ose même critiquer certains aspects du comportement du chef de la France Libre. En novembre 1942, en effet, Brossolette lui écrivit une lettre où il lui exposait les inquiétudes que lui causait ce comportement :
« Mon Général, lui disait-il, ce qu’il faut vous dire, dans l’intérêt de la France Combattante, dans celui de la France, c’est que votre manière de traiter les hommes et de ne pas leur permettre de traiter les problèmes éveille en nous une douloureuse préoccupation, je dirai volontiers une véritable anxiété.
« Il y a des sujets sur lesquels vous ne tolérez aucune contradiction (...). Dans ce cas, votre ton fait comprendre à vos interlocuteurs qu’à vos yeux leur dissentiment ne peut provenir que d’une sorte d’infirmité de la pensée ou du patriotisme. Dans ce quelque chose d’impérieux qui distingue ainsi votre manière et qui amène trop de collaborateurs à n’entrer dans votre bureau qu’avec timidité, pour ne pas dire davantage, il y a probablement de la grandeur. Mais il s’y trouve, soyez-en sûr, plus de péril encore. Le premier effet est que, dans votre entourage, les moins bons n’abondent que dans votre sens, que les pires se font une politique de vous flagorner, et que les meilleurs cessent de se prêter volontiers à votre entretien. Vous en arrivez ainsi à la situation où vous ne rencontrez plus qu’un assentiment flatteur. Mais vous savez aussi bien que moi où cette voie a mené d’autres que vous dans l’Histoire, et où elle risque de vous mener vous-même.
« Or, il s’agit de la France. Vous voulez en faire l’unanimité. La superbe et l’offense ne sont pas une recommandation auprès de ceux qui sont et demeurent résolus à vous aider. Encore moins le seront-elles auprès de la nation que vous voulez unir (…).
« Il faut que vous ayez avec eux (vos collaborateurs) des rapports humains, que vous sollicitiez leur conseil, que vous pesiez leurs avis. Les grands chefs de gouvernement l’ont toujours fait. Ils ne se diminuaient pas ainsi. Ils se grandissaient (...). C’est dans l’adversité qu’il faut le plus se contrôler soi-même, car elle est une terrible école d’amertume, et l’amertume est la pire des politiques »
(1).

Que pensa le Général de cette lettre ? En tout cas, il conserva sa confiance à Brossolette et le chargea de missions difficiles, et, en particulier, de la mission Arquebuse-Brumaire. Elle était confiée au colonel Passy (Dewavrin), qui dirigeait le BCRA (Bureau de renseignements et d’action) et à Brossolette. Elle devait épauler, en zone Mord, celle qu’avait Jean Moulin en zone Sud, et elles avaient toutes les deux pour but d’unifier les Mouvements de Résistance et de former un « Comité Central » comprenant non seulement les « Mouvements » mais aussi les « Partis » qui militaient dans la Résistance (c’étaient le PS et le PC) et même les partis qui ne s’étaient pas manifestés dans la Résistance et de les unir sous la direction du général de Gaulle. Les efforts des deux missions aboutiront à la création du CNR (Conseil National de la Résistance), dont la première réunion eut lieu le 21 mai 1943.

Au cours de ces missions de violentes discussions eurent lieu entre Brossolette (appuyé par Passy) et Jean Moulin. Elles provenaient des différences politiques qui existaient entre les deux hommes. Brossolette était socialiste. Moulin avait été l’ami et le chef de cabinet de Pierre Cot, quand celui-ci était ministre. Or, Pierre Cot était radical-socialiste, assez hostile aux socialistes. Pendant la guerre, il vécut aux États-Unis et ne se railla pas à de Gaulle. Lui et Moulin entretinrent cependant une correspondance active. Après la guerre, Pierre Cot fut député « compagnon de route » des communistes. De son côté, Moulin avait beaucoup d’amis communistes et il nomma plusieurs communistes (ou pro-communistes) à des postes importants. Cependant, il avait toute la confiance du général de Gaulle, et son patriotisme ne fait pas de doute. Mais il y avait entre Brossolette et lui désaccord de doctrines, de moyens et de caractères. Moulin fût arrêté le 21 juin 1943, un mois après la constitution du CNR, dont il était Président. Il fallait lui trouver un successeur comme « représentant du général de Gaulle en France », Brossolette pensa à Bollaert, ancien Préfet de Lyon. Il décida de l’emmener à Londres pour le présenter à de Gaulle. Après un embarquement raté en Bretagne, la tempête fit chavirer, près de la pointe du Raz, la mauvaise barque qui les emmenait, ils furent arrêtés et emprisonnés à Rennes. Brossolette ne fut reconnu que lorsque sa mèche de cheveux (qu’il teignait) se décolora... Il fut alors transféré à Paris, enfermé Avenue Foch, torturé... Il réussit à tromper la surveillance de ses gardiens et se jeta par la fenêtre du 5e étage. Il ne mourut que quelques heures après. La France avait perdu un des hommes politiques les plus doués, qui lui aurait été si utile après la guerre.
(1) Lettre citée par Daniel Mayer dans son livre Les socialistes dans la Résistance (PUF).

Pierre Vienot
Ancien sous-secrétaire d’Etat, du Front populaire, Vienot s’embarqua sur le Massilia. Il fut (tout comme Mendès France) condamné par Vichy comme déserteur. Malade, il obtint un sursis. Arrêté de nouveau, il est emprisonné à Vals et à Evaux, puis mis en résidence surveillée en Savoie, Il peut s’évader et il rejoint Londres, En juin 1943, de Gaulle, qui vient de créer le « Comité Français de Libération Nationale » (CFLN), le nomme ambassadeur auprès des Alliés. Besogne difficile et fatigante qui l’oblige à de nombreux voyages. Sa santé délicate n’y résista pas. Epuisé, après avoir accompagné, après le débarquement, de Gaulle à Bagneux (13 juin 1944), puis prononcé, le 18 juin, un discours à Londres pour commémorer « l’Appel » de De Gaulle, Pierre Vienot mourut, le 20 juillet, d’une crise cardiaque. Il laisse le souvenir d’un homme remarquable tant par son intelligence que par son intégrité, son désintéressement, son dévouement.
Sa femme, Andrée Vienot, partagea ses convictions et resta fidèle au Parti Socialiste.

Alain Savary
En 1940, dès le 18 juin, il rejoint de Gaulle à Londres. Il n’a que 22 ans. Il est affecté comme Enseigne de Vaisseau aux Forces Françaises Libres. C’est à ce titre qu’il fait partie de l’expédition aux îles Saint-Pierre et Miquelon, commandée par l’Amiral Muselier (décembre 1941). Il y reste comme Administrateur de ces îles jusqu’en 1944, Il a à résoudre un certain nombre de difficultés créées par quelques fonctionnaires, mais il a pour lui les marins, les pêcheurs, le corps enseignant, les postiers, les douaniers, les gendarmes...
A la fin de la guerre, il fait partie de la 1ère Division Française Libre, et, avec elle, il débarque dans le Var. Il est ensuite nommé par de Gaulle, Commissaire de la République,
Louis Vallon. Polytechnicien, partit dès 1940 à Londres. Il travailla surtout au BCRA,
Pierre Bloch. Député depuis 1936, Pierre Bloch est mobilisé au début de la guerre et fait prisonnier en 1940. Il ne peut donc voter le 10 juillet 1940. il s’évade le 17 octobre 1940, contacte un réseau anglais et, avec lui, organise en Dordogne, le 10 octobre 1941, le premier parachutage d’armes sur le sol français. Il est arrêté, peu après, à Marseille, il s’évade de nouveau, et, par les Pyrénées, arrive en Espagne où il est enfermé au camp de Miranda. Comme il a des papiers canadiens, les Anglais obtiennent sa libération. Par Gibraltar, il gagne l’Angleterre (novembre 1942).
Il s’engage dans les Forces Françaises Libres. Après un stage en Ecosse (hiver 1942-43), il revient à Londres et travaille avec Passy au BCRA, puis il rejoint à Alger le général de Gaulle pour qui il a une vive admiration (fin 1943). De Gaulle le nomme alors adjoint d’Emmanuel d’Astier qui est Commissaire à l’Intérieur, et il reste jusqu’à la Libération. De Gaulle, lorsqu’il forme son premier gouvernement, remplace alors d’Astier par Adrien Tixier, qui prend le titre de Ministre de l’Intérieur. Plus tard, en réfléchissant sur tous ces événements, Pierre Bloch révisera son appréciation des choses et des hommes, et intitulera ses Mémoires : Le temps des méprises...

Pierre-Olivier Lapie
Député depuis 1936, et officier de réserve, P.O. Lapie participe à l’expédition de Norvège. De retour à Brest il part pour l’Angleterre le 22 juin, après avoir entendu « l’Appel » de De Gaulle. Il parle à la BBC le 10 juillet 1940, puis est nommé par de Gaulle, gouverneur du Tchad (novembre 1940). il collabore avec le Général Leclerc, fait avec la Légion Etrangère les campagnes de Libye et de Tunisie, et pense à faire de l’Empire français une Fédération, idée neuve à l’époque.

Georges Boris
Economiste et ami de Mendès France (dont il dirigera plus tard, quand celui-ci deviendra président du Conseil, le cabinet), collabora aussi avec Blum au moment du Front populaire ; Boris rejoignit très vite Londres et collabora étroitement avec de Gaulle pour lequel il avait une grande admiration, tout en entretenant de bonnes relations avec le Groupe Jean Jaurès. Sa très grande compétence économique et politique furent très utiles au Général de Gaulle.
Les autres socialistes qui rejoignirent de Gaulle à Londres ou à Alger commencèrent par faire de la Résistance en France. Certains ne restèrent à Londres que quelques semaines, d’autres y restèrent jusqu’à la fin de la guerre. Parmi ceux-ci notons :

Jules Moch qui avait d’abord participé à l’expédition de Norvège, était revenu à temps pour dire « non » à Pétain, avait été arrêté avec Vincent Auriol et Marx Dormoy, relâché, passé dans la clandestinité, puis s’était décidé à partir à Londres pour servir comme militaire. Le général l’affecta aux Forces Françaises Libres (avril 1943). Mais dès octobre 1943, il participe aux travaux de l’Assemblée Consultative d’Alger, avec plusieurs autres parlementaires venus rejoindre de Gaulle.

André Le Troquer et Vincent Auriol étaient arrivés à Londres peu de temps avant Jules Moch. Le Troquer, qui avait été l’avocat de Blum au procès de Riom, fut nommé Commissaire à la Guerre par le Général de Gaulle à Alger.

Félix Gouin resta en relations étroites avec Léon Blum et, jusqu’à ce que celui-ci soit déporté, il lui envoya des rapports précis sur ce qui se passait dans l’entourage du général de Gaulle, sur les éléments bons – ou moins bons – de cet entourage, rapports qui permirent à Blum d’avoir une idée assez exacte de ce qui se passait.

André Philip
Professeur de Droit, adhérent de la première heure de Libération-Sud, rejoignit assez tôt de Gaulle à Londres et à Alger, où il fut chargé des rapports entre l’Assemblée Consultative et le Comité Français de Libération Nationale.
Adrien Tixier, qui partit rapidement à Londres et semble avoir eu une certaine influence sur le Général, fut Commissaire au Travail et à la Prévoyance, avant de devenir Ministre de l’Intérieur après la Libération.
René Cassin, éminent professeur de droit, rejoignit de Gaulle dès 1940. Il fut, durant toute l’occupation, le conseiller juridique du Général. Sa science du Droit lui permit de rédiger des accords qui gardaient à la France Libre , ainsi qu’au Comité National de la France Libre et enfin, au Gouvernement Provisoire, un caractère parfaitement légal. Il rendit ainsi de grands services à de Gaulle, qui ne put être accusé d’être un « usurpateur ». On sait le prix que de Gaulle attachait à sa « légitimité ». C’est en grande partie à Cassin qu’il la dut. Il le savait et ne l’oublia jamais. René Cassin a, en outre, rédigé la célèbre Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Il a été président de la Cour européenne des Droits de l’Homme et vice-président du Conseil d’Etat.

V - LES SOCIALISTES EN AMERIQUE
Peu de Socialistes s’exilèrent en Amérique. Parmi les plus connus, citons d’abord Paul Rivet, député et directeur du Musée de l’Homme, ethnographe célèbre qui, justement, avait étudié les civilisations aztèques, et, tout naturellement, se fixa au Mexique pendant l’occupation, après avoir échappé de peu à l’arrestation, et avoir inspiré, dès les premiers mois après la défaite, la formation d’un mouvement de Résistance, appelé Mouvement du Musée de l’Homme puisque son centre était justement le Musée de l’Homme et ses principaux dirigeants des élèves de Paul Rivet (comme Vildé, Levitzky, Yvonne Odon, Agnès Humbert, Germaine Tillon, etc.) auxquels s’étaient joints des socialistes, comme l’avocat Léon-Maurice Nordmann. Nous en avons parlé plus haut.
Marceau Pivert se fixa aussi au Mexique. Il appartenait à l’extrême gauche du parti (la Gauche révolutionnaire). On peut penser qu’il ne pouvait accepter sans réticence que la Résistance eut pour chef un militaire, et un militaire qu’on présentait souvent comme plus ou moins « maurassien ». Il l’accepta cependant, mais lui écrivit une lettre où il précisait que son but immédiat et celui de De Gaulle étaient bien les mêmes : détruire le fascisme, mais que son espérance restait l’établissement d’une République socialiste. De Gaulle lui répondit que « sans préjuger de ce que serait l’état social de la France après la victoire, il (lui) paraissait indiscutable qu’aujourd’hui les exploiteurs et les tyrans des classes laborieuses, c’étaient Hitler et Mussolini…»
Comme beaucoup de socialistes, Marceau Pivert n’était « gaulliste » que pour vaincre le fascisme, pour le temps de la Résistance.
Parmi les socialistes qui vécurent aux Etats-Unis pendant l’occupation, il ne faut pas oublier le grand physicien Jean Perrin.
 

 
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