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L'OFFICE UNIVERSITAIRE DE RECHERCHE SOCIALISTE
 
Lafon/Tartakowky-Margairaz
Tout sur le Front populaire
par Eric Lafon
a/s de
Michel Margairaz et Danielle Tartakowsky
« L’Avenir nous appartient ! »
Une histoire du Front populaire

Larousse 2006 21 x 27 cm 240 p 35 e

Il y a 70 ans, le Front populaire accédait au pouvoir. Depuis, chaque anniversaire, chaque célébration soulignent les conquêtes d’une expérience de ce premier gouvernement de la gauche à direction socialiste dans l’histoire, mais aussi ce que nous appelons les échecs du Front populaire et que d’autres, certes peu nombreux, dans la sphère politique, peuvent considérer comme des trahisons. L’apport de la recherche historique, rigoureusement menée, a permis depuis plusieurs dizaines d’années de se soustraire des termes du débat posés par la génération du printemps 1968 et d’approcher la question du Front populaire non pas sur des attendus, mais sur sa réalité historique.

Beaucoup de choses ont été écrites et publiées sur ces années de l’entre-deux-guerres et tout particulièrement sur les années 1936-1938. Parmi toute cette production, un travail pour autant se distingue des autres parce que s’inscrivant dans la continuité et dans l’enrichissement permanent : celui de l’historienne Danielle Tartakowsky. Avec la publication de L’Avenir nous appartient, rédigé avec un autre historien, Michel Margairaz, et les apports de Daniel Lefeuvre, l’historienne examine une nouvelle fois cette histoire du Front populaire. L’ouvrage est magnifiquement illustré d’une iconographie commentée et qui, par conséquent, dialogue en permanence avec le texte principal. Des pages thématiques, comme autant de points de réflexion, sont l’occasion d’un approfondissement d’une question, d’un fait, d’un phénomène, de représentations, de pratiques, de personnages clés de l’époque. Ces pages composant le sommaire pourraient être considérées comme le corps de l’ouvrage, or cette construction intelligente et très intéressante, par son aspect novateur, aiguise définitivement la curiosité et suscite d’autant plus l’intérêt pour l’ouvrage dans sa globalité.

De nouveaux apports
L’apport nouveau, au regard d’autres publications, y compris celle-là même de Danielle Tartakowsky comme son La vie est à nous publié en 1996 réside aussi dans l’ajout de deux chapitres absents des éditions précédentes. L’un, intitulé « points aveugles », traitant du Front populaire et de la question coloniale, abordé dans les chapitres de L’histoire de la France contemporaine (éditions sociales, 1980), mais ici synthétiquement traité, et pour la première fois abordé, les procès de Moscou et le stalinisme. L’autre, peut-être comme point final d’un travail, sur la mémoire du Front populaire, ses images, ses rejets et ses filiations, ses anniversaires, la manière respectivement pour le Parti socialiste et le Parti communiste, de le « célébrer ».
Michel Margairaz et Danielle Tartakowsky nous épargnent, parce qu’historiens, le récit légendaire, et nous restituent une rencontre difficile et longue des trois partis politiques de la gauche française. Les débats au sein de la SFIC–PC, tout autant que ceux initiés, notamment par Léon Blum au sein de la « vieille maison » SFIO sont restitués dans leur complexité, sans omettre la prépondérante évolution du Parti radical. Certes pas dans le détail des minutes de discussions au sein des instances internes où les questions théoriques et tactiques se déterminent, mais sans raccourcis et surtout sans problématiques oublis. On peut alors se réapproprier la chronologie des faits qui conduit PC et SFIO à forcément s’entendre au sein de cette alliance défensive contre le fascisme. Reprendre et suivre le fil des discussions aboutissant au compromis pour un programme de gouvernement. Un gouvernement que tous croient échoir au Parti radical et au sein duquel chacun sait qu’il est peut probable d’y compter le PC. Enfin reconsidérer le plus important, ce qui conditionne la réussite du Rassemblement populaire afin qu’il « occupe » le pouvoir au dépend de la « réaction fasciste », c’est-à-dire s’entendre avec le Parti radical de Daladier pour gagner les classes moyennes.

Histoire du Front populaire
À cette histoire politique du Front populaire, des prises de décisions, des évolutions doctrinales, des nécessaires adaptations au moment, est liée une histoire économique, sociale et culturelle. Pour les deux auteurs, il ne pouvait en être autrement. Cette approche parcourt et domine l’ensemble de l’ouvrage et nous confirme de l’importance du Front populaire dans l’histoire de la gauche française et pour le pays tout entier. La « double révolution culturelle » que défendent les deux historiens et qui se manifeste dans le champ politique et dans la gestion d’un temps libre accordé, réside bien dans ce dialogue et cette rencontre définitive entre mouvement ouvrier et République sociale, dans cette équation entre réformes, grèves et acquis sociaux. La double conviction est acquise que des urnes peut sortir un gouvernement au service des travailleurs et qu’il puisse faire adopter par la voie parlementaire, soutenu par un puissant mouvement de grève, une série de réformes sociales.
L’adieu aux barricades, prononcé par les manifestants le 24 mai 1936 au mur des fédérés, est de ce fait significatif au-delà du symbolique, tout autant que cette réappropriation de l’histoire révolutionnaire et républicaine du mouvement ouvrier français aux dépens de toute référence à la Révolution russe. Pour autant rien n’est joué et les difficultés en matière économique dans lesquelles le Front populaire s’enlise rapidement comme les contraintes ou les hésitations dans le domaine international, particulièrement sur l’Espagne, qu’il subit ou dont il fait preuve, sont suffisamment développées dans l’ouvrage pour nous rappeler en ce 70e anniversaire que l’histoire du Front populaire est aussi une histoire complexe, mais toujours engageante.
Eric Lafon
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